Errance du chevalier sans nom

Longue était sa route vers son but encore voilé, chevalier sans monture, sans épée, ni armure, il se perdait bien souvent sur les chemins détournés de l’oubli du souvenir d’une raison fugitive. Trop nombreuses étaient les lunes passées depuis le jour qui entendit son serment autour de la table, et dans le creux d’un val à l’ombre des grands pics, lourde se faisait à présent sa démarche insistante, rémanence de ce qui fut perdu sous les neiges éternelles de sommets jamais atteints. Même à ses heures les plus belles, trompeuses ambassadrices du fantôme sans corps de l’idéal, qui n’existe que pour lui-même, rien ne semblait tenir ou être construit par ses mains habiles à faire du néant le contenu des choses.

Et c’est après milles nuits et aurores perdues, que ses pas le menèrent sur le versant oublié d’une haute colline, comme revêtue d’or par le toucher de l’aube. Habité d’un silence ignorant de lui-même, au milieu une nature inconsciente de son éveil, par ses yeux son regard contemplait la brume matinale. Telle une reine à la blancheur troublante étalant son empire sur la vaste plaine de Fangorn, elle enlaçait de-ci de-là les cimes solitaires d’une forêt au vert profond, dont le bruissement répondait au passage de vents porteurs de la fragrance d’un pays familier, lui rappelant qu’un coeur vivait encore en sa poitrine.

Au milieu des arbres et des bêtes sauvages, le chevalier déchu abandonna là cette vision furtive d’un pays qu’il quittait, et se tourna vers les terres de Lorien espérant y trouver quelques reliques lui apportant la réponse au pourquoi qu’il ignorait.